Cuisine–séjour : scénariser volumes et usages sans complexifier la production

Cuisine–séjour : scénariser volumes et usages sans complexifier la production

À Paris comme à Bordeaux, la pièce à vivre est devenue un terrain d’arbitrage entre lumière, rangements, flux du quotidien… et mètres carrés comptés. Dans la capitale, la surface moyenne d’un logement tourne autour de 50 m² (toutes typologies confondues, 2021, source OLAP/CCI Paris Île-de-France), ce qui renforce l’exigence d’un dessin précis dès l’esquisse. À l’échelle nationale, la cuisine ouverte continue par ailleurs de gagner du terrain : en 2024, près de la moitié des propriétaires interrogés déclarent une cuisine entièrement ouverte, et plus d’un tiers l’ouvrent davantage sur la pièce à vivre lors des travaux. Ces ordres de grandeur expliquent l’engouement pour des méthodes de conception rapides qui testent plusieurs dispositions sans alourdir la chaîne de production documentaire. 

1) Le 2D pour fixer le langage, le 3D pour décider

On commence par un plan cuisine en 2D soigné : emprises des meubles, triangle d’activités, sens d’ouverture des portes, accès au balcon/terrasse, séquences de circulation (entrée → cuisine → séjour). Ce tracé fixe le langage commun avec le client et évite les malentendus (côtes claires, allèges et linteaux visibles sur les élévations). Ensuite, des vues séjour 3D – sobres, sans recherche photoréaliste – permettent de comparer des options concrètes : retour snack ou linéaire, cloison vitrée ou semi-ouverture, banquette intégrée ou table îlot. L’idée n’est pas de faire “plus beau”, mais de décider plus vite entre 2 ou 3 variantes d’aménagement.

2) Deux villes, deux contraintes… une même logique d’usage

Paris. Les surfaces contenues et les distributions d’immeubles anciens imposent de vraies astuces : cuisine en niche et séjour traversant, refend porteur à respecter, fenêtre unique à valoriser. Dans un logement de 45–55 m², gagner 60–80 cm de profondeur sur l’espace repas grâce à une banquette murale change la vie quotidienne ; côté cuisine, un linéaire compact (2,40–2,80 m) avec rangements hauts jusqu’au plafond compense l’absence de cellier. Les chiffres rappelant la compacité parisienne justifient cette économie de moyens. 

Bordeaux. Le bassin de vie accueille une part croissante de ménages d’une personne, ce qui influe sur le cahier des charges : besoin d’un poste de travail discret dans le séjour, volumes modulables entre dîner à deux et réception ponctuelle, et gestion du bruit côté cuisine. Ici, on privilégie des partis simples à ouvrir/fermer (verrières coulissantes, claustras amovibles), qui adaptent le plateau de vie sans multiplier les ouvrages. 

3) Un protocole d’itération rapide (sans BIM ni VR)

Le cœur du workflow reste un plan de maison 2D lisible : on fige le plan, on génère des façades et des coupes cohérentes, puis on produit quelques vues 3D d’ambiance. Chaque modification sur le plan est reprise dans les vues avant l’export PDF (mise en page et échelle paramétrables). Pour comparer A/B, on duplique les planches et conserve les mêmes cadrages afin d’évaluer objectivement les options,  un aller-retour rapide, sans recourir au BIM ou à la VR.

4) Les six réglages qui font gagner une réunion

(1) Ouvert/fermé ? Dessiner les deux scénarios à l’identique (même cadrage, même échelle) : cloison vitrée 2 vantaux vs ouverture pleine hauteur, avec flèches de circulation.
 (2) Axes de lumière. Sur plan et élévations, nommer et coter les baies, lister allèges et linteaux ; en 3D, cadrer le point de vue depuis l’entrée et depuis la fenêtre principale pour comparer les ambiances.
 (3) Bruit et odeurs. Matérialiser en 2D la zone « projections et fumées », puis annoter le dispositif de séparation (porte coulissante/verrière), sans sur-spécifier la technique.
 (4) Rangement réel. En élévation, compter les modules : largeur utile totalisée, tiroirs bas, colonnes. En 3D, vérifier l’impact volumétrique dans le séjour.
 (5) Table vs îlot. Sur plan, dessiner l’assise (rayon de chaise = 60 cm), afficher les distances libres (90–110 cm) autour d’un îlot ; en 3D, montrer la perception à hauteur d’œil assis/debout.
 (6) Poste de travail discret. En 2D, réserver un linéaire 120–140 cm en façade séjour, prises et éclairage notés ; en 3D, vérifier la cohabitation visuelle avec l’espace TV.

5) Documents qui se lisent (même en N&B)

Un dossier PDF unique, paginé, fait gagner du temps en réunion : couverture (titre/adresse), sommaire, plan existant → plan projet, élévations (cuisine, paroi sur séjour), coupes ciblées (faux plafond, reprise de cloison), 3D d’ambiance finale. Sur chaque planche : cartouche complet (projet, auteur, date, échelle, orientation, version), barre d’échelle, légende courte (dépose / création). Imprimez une fois en N&B : si l’information s’efface, renforcez épaisseurs de traits et hachures.

6) Données, perceptions, décisions

Les tendances d’usage soutiennent ce protocole : cuisines plus ouvertes, attentes d’une pièce à vivre modulable, surfaces contenues en grande ville. Dans un marché où les logements sont plus petits et où la demande de flexibilité augmente (Paris), ou plus variés avec davantage de ménages seuls (Bordeaux), la scénarisation 2D/3D permet d’atterrir vite sur un compromis clair : convivialité vs. intimité, rangements vs. respiration, poste de travail vs. coin TV. 

7) L’outil adapté à l’échelle du projet

Un logiciel plan maison suffit pour tout cela : tracer le plan, générer coupes et élévations cohérentes, poser des annotations lisibles, et produire un PDF propre. Les rendus 3D restent au service de la décision (angles répétés, lumière crédible) plutôt qu’au spectacle. L’absence de BIM/VR n’est pas un manque : c’est une discipline qui concentre l’effort sur les choix et limite les risques de dérive. L’échelle visée – maison individuelle, petit collectif – n’exige pas davantage pour décider.

En pratique (Paris/Bordeaux) : un micro-scénario

Avant : plan existant et quelques photos, relevé des contraintes (pousses, colonnes montantes, refends), cadrage des objectifs (assises, rangements, poste de travail, rapport à la lumière).
 Pendant : deux variantes A/B, chacune déclinée en : plan, élévation principale, coupe utile, vues 3D identiques en cadrage. Une troisième option « hybride » synthétise les points forts A/B.
 Après : choix validé en séance, liste courte de prescriptions (réservations, hauteurs, notes techniques sans dimensionnement), export d’un PDF paginé (5–8 planches) transmis au syndic/maîtrise d’ouvrage.

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